gabolecoco

Je ne sais pas comment parler de moi. Je pense que je n’ai pas envie de parler de moi. Pas de cette manière, celle qui dresse le portrait de mes accomplissements: chaque jour je surmonte la mort, et cet accomplissement vaut plus que n’importe quel trophée. Si je suis ici, c’est parce que j’avais envie de créer un espace qui soit beau, qui puisse partager un peu de mon intime, un peu de mon vrai, même si je ne suis pas à l’abri du filtre du numérique. Je ne suis pas ici pour vous dire avec quel ensemble j’ai travaillé, quels mentors j’ai eus. Je suis ici parce que je vis des choses qui sont si puissantes que seul le geste créateur peut en assouvir le trop-plein. Que cet assouvissement, il arrive souvent qu’il soit beau, qu’il vaille la peine d’être partagé, en concert, en spectacle, ou ici. Je suis ici pour vous dire que je suis violemment vivante, arrachée à chaque instant par les tumultes qui me traversent, le corps meurtri par les heures passées à envoyer des dossiers à toutes ces personnes qui me diront non, le douleur qui me prend au cou et aux reins est celle aussi de cette folie que j’ai choisie, à 15 ans, en pleurant, en me déversant, cette folie qui fait de moi un être qui a mal partout, même au cœur, qui est pauvre, très pauvre, qui se ronge les doigts au sang (littéralement), qui se mange l’intérieur des lèvres, mais qui est VIVANT dans toute la plus pleine puissance de ce que signifie que d’être EN VIE, c’est-à-dire déchirer l’espace par la force écrasante de cette âme qui déborde et de ce corps angulaire qui souffre. J’ai choisi, à 15 ans, que je serais artiste, et à aucun moment je n’ai regretté ce choix. Je ne vous dirai pas quelles bourses j’ai eues, à quels festivals j’ai participé. Ça ne sert strictement à rien. Ça ne sert à rien. Ce n’est pas important.